L'agriculture a besoin d'écosystèmes stables, pas de pesticides !
Communiqués de presseParis, le 14 novembre 2024
Le 17 décembre, le Sénat examinera une proposition de loi visant à démanteler la plupart des dispositions qui préservent l'environnement dans les pratiques agricoles : ré-autorisation des pesticides néonicotinoïdes, agrandissement facilité pour les élevages industriels, creusement massif de mégabassines d'irrigation… Pire qu'une régression, ce texte constitue un véritable sabotage de l'agriculture de demain, dans une logique obscurantiste et suicidaire.
À la première lecture, la proposition de loi portée par les sénateurs Duplomb et Menonville semble être une farce, tant elle caricature ce que l'agriculture industrielle peut imaginer de pire :
-
ré-autorisation des pesticides néonicotinoïdes n'ayant pas encore fait l'objet d'une interdiction européenne globale, tel l'acétamipride pourtant identifié comme ultra-toxique,
-
possibilité donnée au ministre de l'agriculture de ne pas suivre les avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) sur la dangerosité des pesticides,
-
rehaussement des seuils en-deçà desquels un élevage industriel peut s'agrandir sans réaliser d'évaluation environnementale, ni d'enquête publique (pourtant déjà relevés en juin 2024 !),
-
réduction de la procédure de consultation du public,
-
soutien à la construction de mégabassines d'irrigation au profit des agromanagers industriels,
-
renforcement du lobby agricole dans les instance de gestion de l'eau,
-
réduction des zones humides protégées (par modification des critères d'éligibilité).
Ces propositions rétrogrades sont doublement dramatiques. D'abord parce qu'elles conduiraient à un saccage accéléré de la biodiversité (pesticides), du climat (élevages industriels) et des ressources (irrigation), ce qui représente déjà un « bingo » écocidaire rarement atteint dans un simple texte législatif. Ensuite parce qu'elles conduiraient à saper tous les efforts réalisés par les agriculteurs depuis des années pour transformer leurs pratiques dans le sens de l'agroécologie.
Ce texte est une gifle donnée à tou·te·s les paysan·ne·s qui ont engagé leur ferme dans de nouvelles pratiques, et mettra en outre tous les autres encore plus en danger ! Une agriculture gourmande en pesticides se suicide à petit feu, en détruisant les écosystèmes dont elle dépend à long terme. Une agriculture sous perfusion d'irrigation accroît sa fragilité face au dérèglement climatique, qu'elle nie grossièrement au lieu de s'y adapter. Des élevages de plus en plus concentrationnaires sont à la fois de moins en moins soutenables pour l'opinion publique et de plus en plus dépendants des marchés internationaux, donc à la merci des crises agro-alimentaires et géopolitiques.
Cette proposition de loi n'est pas seulement une forfaiture environnementale. Elle accule les paysans dans une impasse et place l'agriculture française dans une situation d'extrême fragilité et d'extrême danger. Les seuls gagnants seront les actionnaires des multinationales et des groupes agro-industriels. Une fois de plus, paysan·ne·s et environnement sont sacrifié·e·s au profit de quelques privilégiés.
Contacts Presse
- Jacques CAPLAT I Coordinateur des campagnes agriculture et alimentation chez Agir pour l'environnement
- Stéphen KERCKHOVE I Directeur général d'Agir pour l'environnement