[Prologue du petit livre noir des grands projets inutiles] Mourir pour des idées...
Agir pour l'Environnement vient de lancer un financement participatif via le site Ulule afin de rassembler les fonds nécessaires en vue d'assurer une large diffusion de la troisième édition du petit livre noir des grands projets inutiles. En moins de 3 jours de collecte, nous avons déjà rassemblé 85% de la somme nécessaire. Ce livre est édité par le Passager Clandestin.
Pour vous aussi contribuer à la réussite de cette collecte, vous pouvez faire un don via le site de financement collaboratif Ulule.
MOURIR POUR DES IDEES…*
Par une belle soirée d’automne, un jeune homme est mort dans la fleur de l’âge ; d’une grenade offensive dans le dos. Durant 48 heures, les plus autorités politiques du pays ont cherché leurs mots, bafouillant ou éructant, oubliant la plus élémentaire compassion, cherchant à cacher leur forfaiture en entretenant une scandaleuse ambiguïté sur les causes de cette mort.
Parce qu’en politique, il ne faut jamais perdre la face, le ministre de l’Intérieur s’est cru autoriser à affirmer que la mort de Rémy Fraisse n’était pas une bavure. A l’évidence, le décès de ce jeune botaniste ne l’était pas ! Au regard des violences physiques et verbales perpétrées par les forces de l’ordre qui ont émaillé la plupart des rassemblements en septembre et octobre 2014, à Sivens et ses environs, le drame qui s’est noué le 26 octobre 2014 n’a été une surprise que pour celles et ceux qui n’ont pas voulu voir une réalité qui se dessinait à grands coups de matraques et flash-balls !
Depuis les grands rassemblements et la constitution de la première ZAD ayant mis en échec le projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes en octobre 2012, l’Etat cherche la parade pour étouffer la contestation. De peur de voir naître des mobilisations aussi ludiques que créatives à l’encontre de projets inutiles et imposés, le gouvernement a tenté de pulvériser la contestation. Sivens fut le théâtre d’une violence policière inouïe. La plupart du temps en lisière du droit ; privilégiant la loi du Talion…
A Sivens, malgré des opposants ouverts au dialogue, optant systématiquement pour des actions non-violentes, les autorités locales et nationales n’ont eu qu’une idée en tête : en finir, quelque en soit le prix, avec cette contestation protéiforme. Et le prix à payer fut les larmes d’une famille et l’amertume de militants sidérée par ce déploiement de force.
Ce déchaînement de violence révèle la force de l’idéologie, le poids des certitudes qui irriguent ce petit monde politique empreint d’une morgue qui suinte de la commissure des lèvres et transpire de tous les pores de la peau.
Les projets contestés aux quatre coins du territoire esquissent une ligne de fracture entre cette classe politique arcboutée sur ses certitudes nées durant les trente glorieuses et cinquante gaspilleuses et une société qui a déjà engagé sa mue écologique. Inapte à saisir ce basculement historique, l’oligarchie joue du bâton.
L’histoire nous éclaire pourtant. Ceux qui usent et abusent de la violence, fusse-t-elle légale, perdent, avec le temps, toute légitimité, pour tomber ensuite dans l’oubli et le mépris. Voici venu le temps de tourner la page, de balayer ces scories idéologiques qui ont porté au pinacle croissance et détestation de la nature, progrès techno-scientifique et haine de cette humanité qui sommeille en nous.
Le combat contre les grands projets inutiles est une lutte existentielle. Locale et globale, chaque mobilisation est tout à la fois une preuve de la vitalité sociale et l’expérience sensible de notre aptitude à contester et espérer un autre monde.
L’oligarchie espérait en avoir fini avec ce peuple irascible. En frappant sans discernement, au point de tuer, elle a mise en scène sa profonde faiblesse. Un gamin en est mort. Nous ne l’oublierons pas !
* Thierry Carcenac, président du Conseil général du Tarn et ardant défenseur du barrage de Sivens a déclaré, à la suite de la mort de Rémy Fraisse «mourir pour des idées, c'est une chose, mais c'est quand même relativement stupide et bête»
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