#Montebourg... Pourquoi l’éléphanteau se trompe énormément !

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Avec votre dernière sortie parue sur MédiaPart intitulée « Pourquoi les écolos se trompent », vous semblez éprouver le besoin de rechercher dans les vieux pots du productivisme des recettes qui ont maintes fois fait la preuve de leur inefficacité.

Pourquoi l’éléphanteau se trompe énormément !
Lettre ouverte d’un écolo Saône-et-Loirien à Arnaud Montebourg

Monsieur le Ministre,

 Saône-et-Loirien d’adoption et responsable d’une association nationale de protection de l’environnement, j’ai eu l’occasion de vous croiser à Mâcon et Paris et cerner les deux facettes d’un personnage public local et national, tout en ambivalence et ambiguïté.

Avec votre dernière sortie parue sur MédiaPart intitulée « Pourquoi les écolos se trompent », vous prenez la suite d’un chevènementiste à peine modernisé qui articule détestation primaire des écologistes et discours anti-européen mâtiné d’une bonne couche cocardière. Savant dosage qui entraina Lionel Jospin au succès qu’on lui connut à la présidentielle de 2002…

Ministre du redressement productif, vous semblez éprouver le besoin de rechercher dans les vieux pots du productivisme des recettes qui ont maintes fois fait la preuve de leur inefficacité. L’avenir de la France repose-t-elle sur un modèle qui fait l’impasse des contraintes écologiques ? N’y-a-t-il pas quelques cécités à ne pas vouloir prendre en compte les enjeux climatiques en soutenant les gaz de schiste ou refuser de voir la menace que constitue le nucléaire et ce après la énième catastrophe « impossible » de Fukushima ?

Plus fondamentalement, la France peut-elle suivre deux politiques industrielles différentes ? Celle défendue par le Chef de l’Etat (qui tarde d’ailleurs à être mise en œuvre) préconisant une diminution de la part du nucléaire, le rejet des gaz de schiste, le développement des énergies renouvelables, et celle supportée par le ministre du redressement productif privilégiant les lobbies de l’énergie Areva, EDF, Total ou GDF-Suez…? A-t-elle les moyens de courir après deux, trois ou dix lièvres à la fois ? Vous semblez oublier que le ministre de l’industrie n’est ni le ministre des industriels ni leur fidèle porte-parole !

La politique énergétique de la France requiert tout à la fois indépendance d’esprit, cohérence et détermination. Or, ministre du redressement productif, vous vous délectez à l’idée de diviser la gauche et les écologistes et ce afin de vous assurer une certaine visibilité en ces temps tourmentés de majorité déboussolée !

Ce rôle d’idiot utile de la gauche ne fait pourtant guère illusion. Vos dernières déclarations cachent mal les piètres résultats de votre politique à la tête du ministre du redressement productif alternant gesticulations franchouillardes et saillis purement idéologiques.

Vos fonctions passées et présentes vous ont pourtant permis d’acquérir une expérience certaine. A la tête du ministère du redressement productif, vous disposez de données factuelles incontestables sur l’impact climatique des gaz et huiles de schiste. En cherchant bien, vous devez également pouvoir trouver des éléments sur le vrai coût du nucléaire en termes de recherche, mais aussi de démantèlement et de gestion éternelle des déchets radioactifs. En interrogeant un ou plusieurs assureurs ou l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, ces derniers doivent également pouvoir vous indiquer le coût abyssal d’une catastrophe nucléaire. Le déni en matière énergétique n’est jamais bonne conseillère. Croyez-vous qu’un responsable politique marque l’histoire en regardant dans le rétroviseur ou en plongeant la tête dans le sable, voir les deux !?

Étonnamment, vous réussissez le tour de force de vous différencier en accusant les écolos de tous les maux alors même que votre politique est d’un conformisme affligeant. Paradoxalement, vous vous distinguez en érigeant comme modèle indépassable Pierre Messmer dont nous fêterons, la semaine prochaine, le 40ème anniversaire du plan qui amena la France dans l’impasse nucléaire. Comme la quasi-totalité de la classe politique hexagonale, vous défendez le nucléaire. Comme la quasi-totalité de la classe politique française, cette défense ne repose que sur des a priori idéologiques qui ont amené la France à rater le train de la transition énergétique. Là où l’Allemagne a créé plus de 300 000 emplois ces dernières années dans le secteur des énergies renouvelables, vous prenez la défense du lobby nucléaire qui peine à maintenir moins de 120 000 emplois !

Alors que les crises écologiques, sociales et économiques que connait la France exigent de la part des responsables politiques une vision et une imagination nous permettant de sortir des errements des trente glorieuses et cinquante gaspilleuses, vous semblez prendre un malin plaisir à entretenir des joutes oratoires inutiles, verbiages qui excitent le landerneau politico-médiatique à défaut de répondre aux problèmes de l’humanité. Quant à l’avenir de la France, il va de soi que face aux crises écologiques, elle ne pourra s’en sortir seule. Les menaces climatiques et énergétiques nous obligent à repenser nos relations internationales afin de reconstruire de nouvelles solidarités empreintes d’une fraternité nous liant dans le temps et dans l’espace, avec les pays du Sud et les générations futures.

Stéphen Kerckhove, délégué général d’Agir pour l’Environnement