#gazdeschiste: Lettre ouverte au Ministre de l'environnement
Suite à la publication des recommandations non contraignantes de la Commission Européenne sur l’exploitation des gaz de schiste, Agir pour l'environnement et France Libertés publie une lettre ouverte au Ministre de l’écologie Mr Philippe Martin.
Monsieur Philippe Martin, Ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie,
Suite à la publication officielle le 22 janvier 2014 des recommandations de la Commission Européenne sur l’exploitation des gaz de schiste, nous nous permettons de vous interpeller sur l’aspect non contraignant de cette décision qui inquiète les organisations de défense de l’environnement dont nous faisons partie.
« Les principes minimaux que les États membres sont invités à suivre afin de tenir compte des aspects environnementaux et sanitaires » pour citer Janez Potocnik, sont pour nous très insuffisants, compte tenu de l’orientation de la politique environnementale de l’Union Européenne basée sur la promotion des énergies renouvelables. D'autant plus que ces recommandations vont à l'encontre des engagements climatiques pris par l'Union Européenne comme par la France. La législation européenne en vigueur est trop faible, et bien que nous soyons conscients du droit d’un État membre de déterminer les conditions d'exploitation de ses ressources énergétiques, selon l'article 194 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne, nous sommes également conscients que l’UE ne tient pas compte de son « exigence de préserver et d'AMELIORER l’environnement » selon le même article.
Au-delà des importantes émissions de gaz à effet de serre que l’extraction de gaz de schiste génère notamment via les fuites de méthane, nous sommes très inquiets des risques de contamination des sols et eaux souterraines ainsi que de l'appauvrissement des ressources en eau que la technique de fracturation hydraulique engendre, surtout dans le cas de projets cumulatifs.
C’est pourtant le chemin que prennent aujourd’hui la Grande Bretagne, la Pologne et la Roumanie pour ne citer qu’eux. L’UE reconnaît elle-même dans ses études publiées le 7 Septembre 2012, la forte empreinte environnementale que l’extraction de gaz de schiste entraîne et elle souligne dans les recommandations du 22 janvier que la consommation en eau va entrer en concurrence avec d’autres usages déjà établis (industrie, agriculture, eau potable). Nous ne pouvons pas admettre que l'UE se tourne vers les énergies fossiles sous couvert de croissance économique (qui n'est qu'un mirage) au détriment de l'environnement (dont les conséquences seront elles, réelles). Même si Bruxelles n’exclut pas de rendre ces règles juridiquement contraignantes après une évaluation dans les 18 mois qui suivront la publication au Journal Officiel, il sera déjà trop tard et les sites seront déjà impactés.
D’autre part, il est regrettable de s’apercevoir que les décideurs politiques se montrent aveugles à la forte mobilisation citoyenne ainsi qu'à la réelle défiance de l’opinion publique qui s’exprime en Europe mais aussi en France face à l’expansion de l’exploitation des gaz de schiste. Vous avez dû notamment entendre parler, Monsieur le Ministre, d’une lettre ouverte qui exigeait un « sursaut de sagesse », signée conjointement par plus de 370 organisations et adressés le 16 janvier dernier à tous les décideurs politiques concernés.
C’est ainsi animés par l’inquiétude que nous souhaiterions connaître, Monsieur le Ministre, votre avis sur ces recommandations de la Commission Européenne sur l’exploitation des gaz de schiste. La position politique de la France, malgré les propos réitérés de certains membres du gouvernement, étant claire sur le sujet, ne pourrions-nous pas, à ce titre, interpeller l’Union Européenne sur le développement de ces projets hors de nos frontières et influencer de manière plus significative et ambitieuse la politique environnementale européenne ?
Dans l’attente de votre réponse et dans l’espoir de trouver ensemble des solutions au nécessaire abandon de l’exploitation des gaz de schiste, nous vous prions de bien vouloir recevoir Monsieur le Ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, l’expression de notre haute considération.
Les organisations signataires
France Libertés – Fondation Danielle MitterrandAgir pour l’Environnement