Croissance verte : nous ne RIOns plus !
Face aux menaces pesant sur notre planète, les chefs d’État et de gouvernement, avec l'appui de quelques multinationales, vont tenter de promouvoir une "nouvelle économie verte". Derrière ce bel oxymore se cache la volonté de soutenir une croissance économique fléchissante en tentant de faire "moins pire" qu'avant. L'ambition cachée réside dans la financiarisation de nos biens communs en donnant une valeur monétaire aux ressources naturelles tout en faisant croire au consommateur que les techniques utilisées sont "propres", "écologiques", "naturelles", "durables" et "vertes"... Nos ressources naturelles sont alors pillées, polluées, accaparées et détruites au nom d'une croissance simplement repeinte en vert. Au royaume du greenwashing, la croissance verte est reine !
Article paru dans la [LETTRE spéciale RIO+20] EDITO - Si tu vas à Rio...
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Face à l'échec patent du modèle agricole dominant qui repose sur une industrialisation de la pratique agricole, une artificialisation des terres et l'utilisation massive d'intrants chimiques, certains "exploitants" agricoles n'ont de cesse de rechercher de nouveaux débouchés sans changer de pratiques. Le consommateur, de plus en plus rétif à ingérer une malbouffe suremballée, amène le lobby agro-industriel à changer son fusil d'épaule. C'est ainsi que les promoteurs d'une agriculture en guerre avec le vivant tentent d'imposer des agrocarburants pour alimenter... les automobiles à défaut de nourrir le monde. Ils permettent ainsi à l'agriculture productiviste de poursuivre sa fuite en avant. Ce faisant, en utilisant les terres agricoles pour produire des carburants, les agrocarburants aggravent la faim dans le monde. Les émeutes de la faim y sont d'ailleurs directement liées.
En France, environ 6% des terres cultivables sont aujourd'hui dédiées aux agrocarburants. Si l'on devait totalement remplacer le pétrole par des agrocarburants, il faudrait deux à trois fois la surface cultivable totale de la France. Quand on pense que ces terres cultivables sont utilisées pour nourrir nos moteurs plutôt que nos estomacs, de sérieuses questions se posent sur ce modèle agricole qui fait la part belle à quelques semences clonées en guerre avec la biodiversité. Il est aberrant de voir nos terres, notre biodiversité et de fait, notre alimentation, abandonnées au profit d'une production à vocation énergétique.
D'autant que les agrocarburants sont très loin d'avoir démontrés leur intérêt en matière de rejet de gaz à effet de serre. Tout "l'intérêt" de la croissance verte en général et des agrocarburants en particulier est de simuler le changement sans pour autant modifier la donne climatique. Si l'on prend en compte les changements d'affectation des sols, qui amènent les producteurs d'agrocarburants à procéder à de vastes coupes de la forêt amazonienne (pourtant considérée comme un véritable puits de carbone), les émissions de gaz à effet de serre des agrocarburants sont supérieures à celles engendrées par les énergies fossiles ! Non seulement l'économie verte ne répond pas aux menaces écologiques mais elle fait parfois pire que mieux ! Il est grand temps, avant d'opter pour de fausses-bonnes solutions, d'en évaluer les conséquences écologiques et sociales. Face aux multiples controverses posées par les agrocarburants, il est surtout nécessaire de revoir en profondeur la fiscalité française qui les soutient de façon éhontée.
Pour ne pas changer de modèle agricole, afin de ne pas remettre en cause nos modes de déplacement énergivores, l'économie verte nous propose ainsi des agrocarburants qui sauvegardent l'essentiel : le productivisme agricole et le « bougisme ». Cette économie verte apporte donc des solutions cosmétiques en laissant croire qu'il est possible de répondre aux contraintes climatiques en recourant à des options purement techniques. Or, les crises climatiques, énergétiques et écologiques sont éminemment politiques. Elles requièrent des réponses courageuses et des changements de comportement, à mille lieues de cette croissance verte qui n'est qu'une illusion nous faisant perdre un temps précieux.
Pour en savoir plus
Consultez le site du Réseau Action Climat
Campagne "Agrocarburant : La menace"