Après le dépassement…

Par Stéphen Kerckhove, délégué général d'Agir pour l'Environnement

Le 08 août 2016 était le jour du dépassement ; jour théorique au-delà duquel l’humanité a consommé la totalité des ressources renouvelables qu’elle est capable de produire en une année. A partir de cette date, nous vivons à crédit.

Le 08 août 2016… c’était hier. Par amnésie ou déni, nous avons vécu cette journée avec une pointe de culpabilité bien vite oubliée. Comme chaque année, trop n’est jamais assez. Nous continuerons à vivre en sur-régime, normalisant l’excès tout en le regrettant ingénument une fois l’an.

L’orgie consumériste pourra donc continuer. L’oligarchie sait pouvoir compter sur notre participation active. Nous poursuivrons à égrainer les mauvaises nouvelles climatiques sans pour autant en mesurer le caractère profondément cataclysmique.

Le force du système « destructiviste » est d’avoir su instiller un imaginaire dans lequel l’individu est doté d’un pouvoir démiurgique et se vit comme un « illimité » en perpétuel devenir. L’écologie n’a pas encore réussi à faire vivre un modèle alternatif suffisamment attractif pour remplacer un système à bout de souffle.

L’heure n’est pourtant pas à la démobilisation. Nous devons co-construire un avenir partagé fait de solidarités nord-sud et intergénérationnelles. Il nous revient la responsabilité collective d’oser renoncer aux facilités de trente glorieuses pour recréer du sens commun.

Dans un monde où les menaces s’accumulent, l’heure est au sursaut. L’accumulation d’objets inertes étouffe notre humanité et ne crée pas le lien vital nous unissant au monde. Sommé, jour après jour, de nous dépasser au sens littéral du terme (« se passer devant »), l’homme est « hors de lui ». L’écologie est une invitation à retrouver les voies de la raison et les chemins de la mesure.

Puisse ce jour du dépassement nous rappeler qu’une limite est avant tout une protection conte notre propre folie des grandeur.